Quoi de mieux que de découvrir un pays de l’intérieur, par sa culture, sa langue, son histoire, sa gastronomie, sa littérature ? Ceux qui veulent découvrir la Grèce vue par ses écrivains, ou tout simplement s’offrir de beaux moments de lecture, trouveront dans ce blog de quoi satisfaire leur envie et leur curiosité. Ils pourront bien sûr commencer par les textes anciens ou les classiques de la littérature Grecque. Ou bien ils pourront emprunter le chemin inverse en se plongeant directement dans le présent ou le passé récent. C’est ce chemin que nous suivons maintenant depuis quelques mois en dévorant, les uns après les autres, les excellents polars de Petros Markaris, suivant pas à pas les enquêtes haletantes du commissaire Kostas Charitos dans les rues d’Athènes ou d’Istanbul.

Né le 1er Janvier 1937 à Istanbul en Turquie, Pétros Márkaris (en Grec : Πέτρος Μάρκαρης) est un écrivain, dramaturge, traducteur et scénariste Grec vivant à Athènes. Il est surtout connu en France comme auteur de roman policier et scénariste du film « L’éternité et Un Jour » de Theo Angelopoulos, Palme d’or du Festival de Cannes en 1998. Mais son œuvre est bien plus vaste. Auteur de pièces de théâtre et de nombreux scenarii de films et séries télévisées grecques, Petros Markaris parle couramment quatre langues et est également traducteur émérite des œuvres de Brecht et Goethe en langue Grecque. En 2013, il reçoit la médaille Goethe, distinction délivrée depuis 1955 par l’institut Goethe pour services rendus à la défense de la langue Allemande à l’étranger, et le prix du polar Européen pour « Liquidations à la Grecque ».

Ce n’est qu’à l’âge de 57 ans que Petros Markaris se lance dans l’aventure du roman policier. Sa série phare, celles des enquêtes du commissaire Charitos, est un best-seller en Grèce et en Allemagne et prend de plus en plus d’ampleur en France. Cette série d’enquêtes bien ficelées, où s’expriment tout le talent de scénariste de Petros Markaris, se déroule majoritairement à Athènes et est un prétexte merveilleux pour mettre en scène la Grèce contemporaine et son histoire récente : la dictature des colonels, sa chute, son impact sur la société Grecque, les clans, les errances politiques, l’impact dévastateur de la crise sur la société, les frictions inter-générationnelles, le fossé entre la population du pays et les Grecs de l’étranger… Tout d’un coup, sans effort, c’est toute une partie de l’histoire Grecque et de l’ambiance intime du pays que l’on saisit de l’intérieur, grâce aux coups de pinceau de Markaris, une réalité que l’on ne peut saisir aussi pleinement même si l’on a pour habitude d’arpenter régulièrement le pays.

Le tableau que fait Petros Markaris de l’état de son pays est sans concession. Le rôle de la corruption, des castes politiques, des entrepreneurs véreux y est dénoncé sans détour. Les grèves permanentes embouteillant les rues d’Athènes étouffantes se succèdent sans interruption et déclenchent une frustration immense chez le commissaire comme chez le lecteur, qui se demande comment un pays ainsi immobilisé en permanence peut aller de l’avant. Si le tableau est dur, il n’est pas moins plein de subtilités et de tendresse pour le peuple Grec. On ne peut s’empêcher de frissonner d’effroi devant le suicide d’un commerçant, incapable de trouver les fonds pour poursuivre ses activités et continuer à soutenir sa famille, celui de petites vieilles à la retraite minuscule qui ne veulent plus être un poids pour leurs enfants et pour la société, ou celui de jeunes gens qui, malgré leurs études, ne trouvent pas d’emploi et ne voient plus l’avenir devant eux. La jeunesse Grecque s’en va par wagons vers Londres, Paris ou d’autres horizons, espérant se construire un avenir. Celle qui le peut en tout cas…

Désabusé, râleur, parfois bougon, accablé par la chaleur et les embouteillages, le commissaire Charitos est un enquêteur hors pair, rigoureux et entêté qui parvient toujours à mettre au clair la vérité, même lorsque celle-ci met à mal des personnages en vue et peut nuire à sa carrière. Car s’il est un enquêteur hors pair notre commissaire reste relativement imperméable à la logique politique et se retrouve régulièrement tiraillé entre son besoin d’avancement pour regonfler un salaire qui fond comme neige au soleil et son besoin de vérité.

Le style de Petros Markaris est dynamique, vivant, cinématographique. L’histoire coule toute seule. Chaque chapitre appelle le suivant et on se surprend à relever la tête après plusieurs heures de lecture, sans avoir vu le temps passer. Les personnages qui entourent le commissaire, sa famille, ses collègues, sont pour la plupart attachants et on prend plaisir à les retrouver d’un livre à l’autre de la série. Chaque enquête peut se lire indépendamment des autres, et dans l’ordre que l’on souhaite (cf. liste ci-dessous) car si la trame de fond et l’évolution des personnages suit bien évidemment un ordre chronologique, elle ne présente pas d’élément ou de disruption majeure qui impose un ordre de lecture.

Je trouve les livres sur
Liquidations à la Grecque ICI
Le justicier d’Athènes ICI
L’empoisonneuse d’Istanbul ICI
Epilogue Meurtrier ICI
Pain, Education, Liberté ICI
Le Che s’est suicidé ICI
Publicité meurtrière ICI
Actionnaire principal ICI
Offshore ICI

 

Crédit photo – photo de Petros Markaris : Par Ggia — Travail personnel, CC BY-SA 3.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=10453567